Et si je jeûnais !

Chaque année, quand arrive le temps du carême, resurgit aussi la question du jeûne que nous abordons avec plus ou moins bonne conscience. Faut-il jeûner, pourquoi, quand, comment…?

Voici quelques réflexions sans prétention pour éclairer nos choix. Dans l’évangile nous voyons Jésus jeûner au tout début de sa vie publique. Le texte met en avant l’importance d’accepter la réalité telle qu’elle est, de résister à la tentation du pouvoir et de la richesse, de ne pas demander à Dieu des signes extraordinaires. Jésus éclaire notre chemin en nous mettant en garde contre nos illusions tenaces et nos rêves sans consistances.

Le temps du carême est, en effet un moment pour reprendre conscience de façon réaliste de l’état de notre vie. Le jeûne aide à nous recentrer sur Dieu, à remettre Jésus au cœur de notre vie. Il permet de libérer du temps, de raviver notre attention pour, petit à petit, découvrir la vérité profonde de nous-mêmes. Le jeûne permet de prendre du recul par rapport aux soucis, aux préoccupations envahissantes, de lutter contre les idoles qui nous éloignent de la prière et la véritable rencontre de Dieu et des autres. Il facilite l’acceptation de la réalité de soi-même telle qu’elle est.

Le carême nous permet de nous interroger sur la place que nous accordons au Seigneur dans notre vie. Notre cœur appartient-il vraiment au Seigneur ? Dieu nous aime d’un amour infini, inconditionnel, fidèle, toujours prêt à nous pardonner nos errances et nos fautes. Mais comment l’accueillons-nous et comment le redonnons-nous ? Dans l’évangile Jésus nous montre la force de son amour. Par son exemple, il nous invite à lutter contre tout ce qui disperse et tout ce qui divise et exclut. Si nous le suivons sur son chemin de vie, il nous même jusqu’à la croix et la résurrection. Il nous montre que l’amour de Dieu rend capable d’aimer jusque dans la violence, de supporter calomnie, torture, injustice en gardant la paix du cœur, sans haine et sans désir de vengeance. Au sommet de son amour, il y a le pardon qu’il demande à son Père d’accorder à ses bourreaux. L’acceptation de la réalité ouvre à l’infini de l’amour, à la communion avec le Père et avec les frères, quelque soit la situation dans laquelle nous nous trouvons.

Le carême nous invite à accepter nos manques et nos limites pour que nous puissions demander à Dieu de combler notre vide. Cette attitude permet de renoncer à tout ce qui empêche une relation vraie avec le Seigneur, et d’être plus disponible pour accueillir sa miséricorde avec une confiance totale. C’est dans cette attitude d’abandon que Dieu et l’Esprit-saint nous conduiront vers « une foi droite et une espérance solide et une parfaite charité … » Le carême et le jeûne sont un moment favorable pour purifier tout notre être, notre cœur, notre regard, notre mémoire, notre réflexion. C’est dans ce mouvement que notre visage créé à l’image et à la ressemblance de Dieu peut retrouver sa propre vérité d’homme.

François et Claire d’Assise ont beaucoup jeuné. Les temps de carême étaient pour eux des moments de solitude, de cœur à cœur, de communion profonde avec leur Seigneur. Sans chercher à les suivre dans leur radicalité pour pouvons leur demander de nous aider à vivre ce temps de préparation à Pâques avec beaucoup de joie et de sérieux. Alors les privations, les choix pour être plus proche, plus bienveillant, plus pardonnant nous ferons progresser dans notre attachement à Jésus. Passer plus de temps avec celui que notre cœur aime, être plus attentifs aux frères que le seigneur nous donne, être plus patient dans notre écoute de ceux qui sont en détresse, être plus accueillant à ceux qui nous sollicitent, être plus compatissant avec ceux qui ont besoins de notre aide, être plus ouvert à l’étranger désorienté… ce sont là des invitations que François nous refait chaque jour.

Avec lui apprenons l’amour qui nous fait ressusciter.

« N’ayons donc d’autre désir, d’autre volonté, d’autre plaisir et d’autre joie que notre Créateur, Rédempteur et Sauveur, le seul vrai Dieu, qui est le bien plénier, entier, total, vrai et souverain ; qui seul est bon, miséricordieux et aimable, suave et doux ; qui seul est saint, juste, vrai et droit ; qui seul est bienveillant, innocent et pur ; de qui, par qui et en qui est tout pardon, toute grâce et toute gloire pour tous les pénitents et les justes sur la terre et pour tous les bienheureux qui se réjouissent avec lui dans le ciel. » (1R 23, 9)

Frère Jo Coz

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