Une fraternité incompatible avec la médisance

Dans ses écrits St François insiste beaucoup sur la qualité des relations entre les frères. Il suffit de lire ses Admonitions pour s’en rendre compte ! « Heureux celui qui ne dirait pas derrière son frère ce qu’en toute charité il ne pourrait pas dire devant lui . » Dans la première règle, il nous fait comprendre que la fraternité ne peut exister que si tous nos gestes, toutes nos paroles et toutes nos pensées sont habités par un amour bien concret pour nos sœurs et nos frères : « Ils n’outrageront personne ; ils ne diffameront, ils ne dénigreront personne ; car il est écrit : Le Seigneur hait les rapporteurs et les médisants. Ils seront modestes, animés de la plus grande douceur envers tous les hommes. Ils ne doivent ni juger ni condamner ». C’est sans doute l’expérience quotidienne qui l’a amené à prendre conscience que la conversion pour suivre le Christ inclut la transformation de nos relations avec autrui, mais aussi la méditation des paroles de l’Evangile. « Les détracteurs, les médisants sont ennemis de Dieu » nous précise St Paul. Nous ne voyons jamais Jésus critiquant ou se disputant avec son entourage, au contraire, il demande d’aimer ses ennemis !
Il faut bien admettre que les conseils de François restent d’actualité. Il nous arrive sans doute de critiquer telle personne ou de renchérir à ce que nous entendons. La médisance, la calomnie, les rumeurs malveillantes, les diffamations, les ragots, les vérités déformées, les mensonges, les disputes vaines, la méchanceté gratuite… la liste est longue des comportements qui éloignent de l’invitation de Jésus de nous aimer les uns les autres. Il est nécessaire de prendre conscience que ces bavardages ne sont jamais neutres. En effet, les conséquences sont souvent graves : ils entament la confiance, provoquent des tensions et des conflits, ils portent atteinte à la réputation de l’autre, ils créent des préjudices et des injustices durables, ils détériorent les liens, ils déforment la vérité. St François va même plus loin en disant que ce sont des homicides parce que les mauvais exemples font mourir l’amour dans les âmes (adm 3, 11). Toutes ces attitudes fragilisent la vie fraternelle et la vie en société. Cela explique tous les conseils donnés par François pour que les frères luttent contre tout ce qui détruit l’amour, l’unité et la communion entre les hommes, les peuples, les religions et qu’ils deviennent de courageux artisans de paix.

Mais alors, que faire pour suivre Jésus ? L’humilité et la douceur qui l’habitaient lui permettaient de résister à toute tentation de domination et de toute possession. Grâce à cela il pouvait regarder chaque personne sans critiquer ses défauts mais en faisant appel à ses qualités, à l’amour mis en lui par son Père, source de toute vie. Il soulignait tout ce qu’il y avait de bon en chacun et qui méritait son estime. Il savait résister aux préjugés et garder une espérance ferme dans les capacités de conversion qu’il y a en chacun. Il ne jugeait personne mais continuait à aimer sans condition ceux qu’il rencontrait. Il supportait avec patience les fragilités, les incohérences de ceux qui luttaient contre lui. Il faisait preuve de bienveillance à l’égard de la foule qui cherchait à le toucher qui venait lui demander des guérisons. Même après son arrestation injuste, il conserve son calme et garde le silence face à ses détracteurs. Il continue de les aimer et va même donner son pardon à ses bourreaux. Son cœur doux et humble faisait de lui un diffuseur de paix. Sa bonté était plus forte que le mal. Sa mission était de sauver tous les hommes, sans en perdre un seul. Il ne maudissait personne, Il disait du bien et souhaitait du bien à chacun et il continue de le faire aujourd’hui pour chacun d’entre nous !
A la suite de de Jésus et de François qui sut mettre en pratique son enseignement, nous sommes invités à abandonner définitivement toute tentation de dire du mal de ceux qui nous entourent, à remplacer nos méfiances par une confiance enracinée dans celle de Jésus, à renoncer à nourrir tous nos soupçons contre ceux qui nous déplaisent. Libérons de la place pour l’amour que Dieu nous donne chaque jour. A la suite de François devenons chaque jour un peu plus « mineur », prêt à servir ceux que nous rencontrons et « à les aimer tels qu’ils sont, sans vouloir qu’ils soient différents ».

« Dieu notre Père nous comble de bénédictions ». Chacun de nous est voulu et aimé de Notre Père depuis notre premier souffle. Fort ce cette présence laissons-nous imprégner par l’Esprit-Saint, qu’il nous rende capable de bénir comme lui (dire du bien), ceux qui nous sont momentanément antipathiques. François ne cessait de bénir ceux qu’il rencontrait. Notre engagement franciscain humble et discret est appelé à devenir un chemin de bénédiction, de don d’amour pour tous qui nous entourent. Que toute notre vie devienne bénédiction, que le bien reçu de celui qui est Tout Bien se diffuse en nous et par nous comme un parfum précieux.
« Que le Seigneur te bénisse et te garde ; que le Seigneur te découvre sa Face et te prenne en pitié ! Qu’il tourne vers toi son Visage et te donne la paix ! Que le Seigneur, frère, te bénisse »

Fr Jo Coz

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