Mère de Jésus, mère de ses frères

Dans sa lettre aux fidèles, François d’Assise nous invite à être mère de Jésus « lorsque nous le portons dans notre cœur et dans notre conscience et que nous l’enfantons par nos bonnes actions qui doivent être pour autrui une lumière et un exemple. » Cette facette de la vie spirituelle peut nous paraître surprenante ou étrange. François dans ses écrits parle à maintes reprises de l’attitude maternelle. Il demande a ses frères de veiller sur les frères malades comme une mère veille sur son enfant. Dans sa règle pour les ermitages il demande que deux frères veillent comme des mères sur les frères qui vivent un temps de prière et de solitude.

Ces différents textes nous invitent à réfléchir sur ce que fut l’expérience de François. En priant la Vierge Marie, il avait saisi l’importance de l’accueil confiant de la Parole de Dieu. Comme elle il avait expérimenté qu’elle était source de vie , de fécondité surprenante. Il avait aussi mesuré combien Marie avait aimé son fils, qu’elle l’avait nourri, soigné avec beaucoup de tendresse et de douceur. François avait sans doute en mémoire aussi la présence affectueuse et compréhensive de sa mère dont il se sentait proche.

Ces qualités, ces attitudes qu’il appréciait, il va les intégrer dans sa manière de vivre avec ses frères. Il veillera sur eux comme une mère attentive. En soignait les lépreux, il avait découvert la force de la douceur. À sa grande surprise ce qui lui faisait horreur s’était transformé en joie profonde. Cette douceur reflétait pour lui celle de Dieu lui-même . Toute sa vie il s’efforcera d’être doux et humble de cœur comme Jésus qu’il voulait suivre.

Cela s’exprimera de multiples manières. Au lieu de se considérer comme un père abbé d’un monastère qui exerce un pouvoir, François choisira plutôt d’être un ministre, un serviteur attentif à ses frères. C’est par la fécondité de l’exemple qu’il choisira de guider ses frères. Cela peut sembler moins efficace mais permet à chacun de faire des choix libres inspirés par Dieu lui-même.

Cette attitude l’avait rendu attentif à ce qui se passait en lui. Il avait fait l’expérience que Dieu se manifestait en lui, en lui révélant son amour, en lui parlant avec délicatesse, en lui éclairant son chemin. Cela lui avait ouvert le cœur et fait découvrir la vraie source de la vie appelée à grandir. Il avait également compris que cet amour ne croissait en soi que si on le partageait aux autres. Petit à petit il va puiser sa vie dans celle de Jésus. Sa capacité a donner la vie va croître. À sa grande surprise il va découvrir que sa manière de vivre suscitait des désirs forts de le rejoindre. Sa maternité spirituelle va s’amplifier rapidement. Sa confiance en la force de l’amour présent en chacun se manifestera par sa manière d’accueillir chaque personne comme un frère habité lui aussi par la même vie. La bonté suscite la bonté, la bienveillance suscite la bienveillance.

Comme une mère qui protège son enfant François veillait sur ses frères et les gardait de tout mal, de toute dérive. Il savait que l’amour de Dieu est fidèle. Cette fidélité il s’efforcera de la vivre jusqu’à la joie parfaite. L’amour est sans limites, il est pour la vie.

Comme une poule rassemble ses poussins autour d’elle, François avait le souci de nourrir ses frères par ses conseils, ses prières, ses exemples, son jeûne. Il reconnaissait en l’Eglise une mère qu’il respectait et qui le nourrissait par son enseignement, ses sacrements. Accueilli sous le manteau de l’évêque d’Assise il avait compris le rôle maternel de l’Eglise. Toute sa vie il lui sera fidèle, rendant grâce à Dieu pour tout ce qu’elle lui donnait. Il reconnaissait en elle le visage maternel de Marie, « la femme faite église ». C’est une manière de nous dire qu’il était sensible à la vie plutôt qu’à l’institution, à la douceur maternelle plutôt qu’au pouvoir paternel, à la compassion plutôt qu’à la puissance, à la piété affective plutôt qu’au savoir froid !

Comme une mère de qui donne la vie, il avait le souci d’envoyer ses frères en mission en leur faisant une totale confiance. Il aimait beaucoup Marie Madeleine à qui Jésus confia la mission d’annoncer sa résurrection, suprême fécondité de l’amour, ouverture à la maternité spirituelle.

Frère Jo Coz

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